Des gènes présents dans des variétés de maïs locales africaines peuvent combattre des insectes foreurs en attirant leurs ennemis naturels, des guêpes parasitoïdes.
Chilo partellus, le foreur ponctué de graminées, insecte dont la larve perce les tiges des plantes, cause aux petits exploitants d’Afrique subsaharienne des pertes de rendement d’environ 1,5 milliard de dollars par an et affecte négativement les moyens de subsistance de près de 300 millions de personnes.
Les petits exploitants ne peuvent pas acheter des pesticides pour lutter contre ces insectes qui affectent environ 50% des cultures en Afrique subsaharienne. Des chercheurs ont étudié la constitution génétique de 146 variétés de maïs, dont celles créés à partir de programmes de sélection formels.
Variété locales
Des variétés locales, sélectionnées par les petits exploitants, ont aussi été évaluées pour déterminer si elles avaient des caractéristiques naturelles qui pourraient aider à lutter contre les ravageurs.
Selon l’étude publiée dans Scientific Reports le 8 juillet dernier, les chercheurs ont identifié un trait de défense plus commun dans les variétés locales que dans celles résultant des programmes de sélection.
Guêpe parasite
« Développer les variétés de cultures qui émettent une odeur appropriée pour attirer les ennemis naturels du ravageur présente une option de lutte contre les ravageurs écologiquement durable et rentable pour les petits producteurs de maïs en Afrique subsaharienne », déclare Amanuel Tamiru, co-auteur de l’étude et chercheur spécialisé dans les interactions entre insectes et plantes au Centre international de physiologie et d’écologie des insectes.
Cette étude impliquait le passage au crible de divers génotypes pour identifier ceux qui attirent Cotesia sesamiae, guêpe parasite africaine qui fréquente les tiges de céréales.
Réaction aux œufs d’insectes
« Les variétés locales… ont donné la plus forte proportion de plantes ayant ce caractère (six sur 15 analysées, soit un taux de 40%) », indique l’étude, ajoutant que Cotesia sesamiae a passé plus de temps sur les odeurs produites en présence d’œufs du ravageur par les variétés locales que sur celles produites par les autres variétés.
« Les foreurs sont des insectes ravageurs du maïs et d’autres cultures vivrières importantes telles que le sorgho, le riz et le mil en Afrique. Ils endommagent ces cultures en creusant à l’intérieur de la tige, provoquant l’effondrement et la mort des plantes », explique Amanuel Tamiru.
Vulnérabilité aux toxines
Il ajoute que ces insectes pénètrent également dans les épis de maïs, ruinent les grains et augmentent leurs vulnérabilité aux aflatoxines, substances toxiques produites par certains champignons, qui peuvent contaminer les cultures vivrières avec de graves menaces pour la santé des humains et du bétail.
Les conclusions de l’étude, explique-t-il, pourraient être essentielles au développement de nouvelles variétés résistantes pour une production durable du maïs.
Prévenir les résistances
A en croire Amanuel Tamiru, l’utilisation d’insecticides pour la lutte antiparasitaire est non seulement coûteuse pour les petits agriculteurs, mais peut également entraîner une résistance des ravageurs, des épidémies secondaires, une pollution de l’environnement et des risques sanitaires pour les personnes qui assurent la pulvérisation.
Amanuel Tamiru dit que les foreurs sapent la sécurité alimentaire dans la région, ajoutant que les résultats fournissent une stratégie pour développer des variétés de maïs avec une résistance naturelle contre les ravageurs.
Pertes de céréales
Murenga Mwimali, scientifique principal et sélectionneur de maïs à l’Organisation kényane de recherche sur l’agriculture et l’élevage, a déclaré à SciDev.Net que la recherche sur les stratégies de lutte contre les foreurs est vitale.
« Au Kenya, les foreurs causent la perte d’environ 400 000 tonnes de céréales par an, ce qui équivaut à neuf milliards de shillings kényans (environ 85,5 millions de dollars) », dit-il.
Nouveaux défis agricoles
Mais Murenga Mwimali estime que des études supplémentaires seront nécessaires pour tester la stabilité des gènes et leur transférabilité dans la population parentale, qui sera éventuellement utilisée pour la production d’hybrides.
Les États africains doivent consacrer jusqu’à dix pour cent de leur produit intérieur brut à l’agriculture, ajoute-t-il.
« Avec les nouveaux défis agricoles qui émergent, y compris les nouveaux ravageurs tels que la chenille légionnaire d’automne, il est fortement nécessaire d’investir davantage dans la recherche agricole pour nous permettre d’atteindre la sécurité alimentaire et nutritionnelle », dit-il.
Eldon Opiyo
Cet article a d’abord été publié par SciDev.Net.