Les technologies faiblement émettrices de carbone que l’on peut déployer en masse, très localement et à faible coût permettraient une transition plus rapide vers la suppression des émissions nettes.
Des innovations allant des panneaux solaires aux vélos électriques présentent des risques d’investissement faibles, un grand potentiel d’amélioration en termes de coût et de performance, et une grande marge de manœuvre pour réduire la demande énergétique : autant d’attributs clés qui contribueront à accélérer les progrès en matière de décarbonisation.
Afin d’atteindre les objectifs climatiques internationaux, les émissions de gaz à effet de serre doivent être réduites de moitié au cours de la prochaine décennie et atteindre un niveau net nul vers le milieu du siècle. Pour ce faire, il faudra transformer rapidement et de façon inédite la manière dont l’énergie est fournie, distribuée et utilisée.
Un grand nombre de technologies énergétiques
Des chercheurs de l’IIASA, du Tyndall Centre for Climate Change Research de l’Université d’East Anglia (UEA) et de l’Institut universitaire de Lisbonne ont collecté des données sur un grand nombre de technologies énergétiques à différentes échelles. Ils ont ensuite testé leurs performances par rapport à neuf caractéristiques de la transformation accélérée à faible teneur en carbone, telles que le coût, l’innovation et l’accessibilité.
Ils se sont ensuite demandé s’il était préférable de donner la priorité aux technologies à grande échelle, coûteuses, non divisibles, telles que l’énergie nucléaire, le captage et le stockage du carbone, les systèmes de transport à grande vitesse et la modernisation de bâtiments entiers, ou de se concentrer sur des options plus « granulaires » : de taille plus petite, moins coûteuses et plus modulaires, que l’on développpas non pas en agrandissant les installation, mais en construisant plus. Parmi les exemples de ces technologies granulaires, citons les panneaux solaires, les batteries électriques, les pompes à chaleur, les thermostats intelligents, les vélos électriques et les taxis partagés (ou « taxibus »).
Les technologies granulaires sont plus performantes que les technologies à grande échelle
Leurs conclusions, qui ont été publiées dans la revue Science, montrent que, sous certaines conditions, les solutions granulaires surpassent les technologies à grande échelle de plusieurs manières.
Le responsable de l’étude, Charlie Wilson, qui est associé au programme Transitions to New Technologies de l’IIASA et à l’UEA, explique : « Une prolifération rapide d’innovations à faible teneur en carbone distribuées dans notre système énergétique, nos villes et nos foyers peut contribuer à accélérer et à rendre plus équitable la progression vers les objectifs climatiques. Nous constatons que les nouvelles grandes infrastructures, qui coûtent des milliards, ne sont pas le meilleur moyen d’accélérer la décarbonisation. Les gouvernements, les entreprises, les investisseurs et les citoyens devraient plutôt privilégier les solutions à plus petite échelle qui se déploient plus rapidement. Cela signifie qu’il faut orienter le financement, les politiques, les mesures d’incitation et les possibilités d’expérimentation non plus vers les quelques grandes entreprises, mais vers de nombreuses petites. »
Des durées de vie plus courtes et une complexité moindre
Outre leur rapidité de déploiement, les technologies à petite échelle ont une durée de vie plus courte et sont moins complexes, de sorte que les innovations et les améliorations peuvent être mises sur le marché plus rapidement. Elles sont également plus largement accessibles et contribuent à créer plus d’emplois, ce qui donne aux gouvernements une base solide pour renforcer les politiques climatiques.
“Les technologies à grande échelle comme l’énergie nucléaire ou le stockage du carbone et de la capture sont politiquement séduisantes, mais les technologies et infrastructures à grande échelle absorbent une grande partie des ressources publiques disponibles sans assurer la décarbonisation rapide dont nous avons besoin”, explique Arnulf Grubler, chercheur émérite de l’IIASA et coauteur de l’étude.
Pas de solution universelle
Les chercheurs soulignent que les technologies à petite échelle ne constituent pas une solution universelle. Dans certaines situations, il n’existe pas de remplacement aux technologies et aux infrastructures à grande échelle, par exemple les avions long courriers ou les usines produisant du fer, de l’acier ou du ciment. Dans d’autres situations, un grand nombre de technologies à petite échelle doivent être intégrées dans les infrastructures existantes : le déploiement massif de pompes à chaleur et de panneaux solaires nécessite des réseaux électriques ; les véhicules électriques ont besoin de stations de recharge ; et les produits d’isolation ont besoin de bâtiments.
« Les innovations à petite échelle ne sont pas une panacée, ajoute Nuno Bento, de l’Institut universitaire de Lisbonne et co-auteur de l’étude. Dans de nombreux contextes différents, elles surpassent cependant les technologies à grande échelle comme moyens d’accélérer la transformation vers le bas carbone pour atteindre les objectifs climatiques mondiaux. »
Dans la vidéo suivante, Charlie Wilson résume l’objectif de l’étude et ses principaux résultats (en anglais).
Ce billet a d’abord été publié par l’IIASA.