Des moustiques génétiquement modifiés sont prometteurs pour lutter contre la propagation de maladies. Mais cette technique doit être utilisée avec précaution.
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a publié de nouvelles directives pour le déploiement des moustiques génétiquement modifiés (GM) pour lutter contre les maladies à transmission vectorielle comme le paludisme et la dengue.
Les moustiques GM peuvent être porteurs d’un gène qui tue la descendance femelle et cette technologie peut être utilisée contre le moustique Aedes aegypti qui transporte les virus de la dengue, du chikungunya et du Zika.
Efficacité, sécurité et éthique
Pour le paludisme, la modification génétique s’est concentrée sur la réduction de la capacité du moustique anophèle femelle à transporter le parasite qui cause la maladie.
Les directives de l’OMS, publiées au mois de mai 2021, portent sur la recherche et le développement relatifs aux moustiques GM ainsi que sur les questions d’efficacité, de sécurité, d’accessibilité et d’éthique.
« L’efficacité des directives dépendra du juste équilibre entre les progrès rapides contre les maladies à transmission vectorielle avec les moustiques GM et la sécurité, ainsi que l’éthique de la nouvelle technologie »
Roly Gosling, université de Californie à San Francisco
À l’heure actuelle, les mesures contre les moustiques vecteurs de maladies comprennent l’utilisation d’insecticides et l’élimination des sites de reproduction des larves de moustiques, selon les directives, élaborées en collaboration avec des partenaires de l’OMS tels que le Programme spécial de recherche et de formation sur les maladies tropicales et le GeneConvene Global Collaborative.
Réduire la transmission du paludisme et de la dengue
« En considérant le potentiel des nouvelles technologies à répondre aux besoins non satisfaits de la lutte contre les moustiques, il est nécessaire d’évaluer leurs risques et leurs avantages dans le contexte de la situation actuelle », déclare le guide.
Il note que l’utilisation de moustiques GM pour contrôler des groupes similaires de moustiques dans la communauté peut réduire la transmission du paludisme et de la dengue.
Mais en raison de leur nouveauté, divers forums ont demandé que les essais sur le terrain soient menés de manière approfondie et transparente dans l’intérêt de la santé et de la sécurité environnementale.
Selon une déclaration de l’OMS du 19 mai 2021, les moustiques GM, s’ils sont sûrs, efficaces et accessibles, pourraient combattre des maladies telles que le paludisme et la dengue et éliminer leur fardeau considérable sur la santé, l’économie et la société.
Comprendre les effets sur l’environnement
Les orientations comprennent des mesures visant à améliorer la compréhension des effets que les moustiques GM peuvent avoir sur l’environnement, la santé humaine et la santé animale.
Elles se concentrent sur les mises à jour relatives aux stratégies les plus efficaces pour l’évaluation des risques et l’engagement des parties prenantes.
La responsabilité des scientifiques
Selon Diabaté Abdoulaye, entomologiste à l’Institut de recherche en science de la santé (IRSS) au Burkina Faso, l’OMS voit la valeur ajoutée de cette nouvelle approche de lutte antivectorielle par rapport aux outils d’intervention actuels, mais est également consciente de sa responsabilité elle-même et de celles des scientifiques dans la lutte contre le paludisme en toute sécurité.
« Tous les ingrédients importants qui peuvent garantir une utilisation responsable et sûre de cette technologie, y compris les défis techniques, les problèmes juridiques et éthiques, l’évaluation des risques et l’engagement du public, sont dans ce document pour guider les scientifiques », a-t-il déclaré à SciDev.Net.
Trouver un juste équilibre
« La manipulation des moustiques GM arrive, et il est excellent qu’il y ait un plan en place pour aider à guider les décisions politiques concernant cette technologie et pour protéger l’environnement et les communautés », affirme Roly Gosling, professeur d’épidémiologie et de biostatistique et conseiller principal au Malaria Elimination Initiative de l’université de Californie à San Francisco aux États-Unis.
« Cependant, l’efficacité des directives dépendra du juste équilibre entre les progrès rapides contre les maladies à transmission vectorielle avec les moustiques GM et la sécurité, ainsi que l’éthique de la nouvelle technologie », ajoute-t-il.
Conséquences inconnues pour l’écosystème
Rahuldeb Sarkar, spécialiste de la santé publique et consultant à l’hôpital Medway dans le Kent au Royaume-Uni, indique qu’étant donné que les moustiques constituent un élément important de la chaîne alimentaire et sont des pollinisateurs, l’éradication d’une espèce de moustique peut avoir des conséquences inconnues pour l’écosystème. « Ces effets, bien sûr, devraient être examinés dans leur intégralité », dit-il.
Des moustiques GM ont été déployés au Brésil et en Inde pour lutter contre les moustiques Aedes aegypti porteurs des virus de la dengue, du chikungunya et du Zika.
Sanjeet Bagcchi
Cet article a d’abord été publié par SciDev.Net