Comment conjuguer connaissances autochtones et science au service du développement durable ?
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L’un des sujets potentiellement controversés concernant la science de la durabilité est le rôle des connaissances autochtones. Les auteurs du rapport The Future is Now soulignent que ces connaissances doivent être prises en compte au même titre que les connaissances scientifiques. Ils n’entrent cependant pas dans le débat.
Les praticiens des sciences fondamentales qui ne sont pas familiers avec les approches et les méthodes des sciences sociales, comme de nombreux physiciens, chimistes, mathématiciens, biologistes, etc. peuvent se demander par exemple ce que l’on peut qualifier de connaissances autochtones. Y a-t-il une distinction à faire entre les croyances et les connaissances ? Et les connaissances autochtones sont-elles toujours dans le meilleur intérêt de l’environnement et de la planète, comme semblent le suggérer les auteurs du rapport ?
Les savoirs autochtones s’appuient sur la compréhension et les pratiques à long terme des systèmes socio-écologiques de diverses sociétés à travers le monde. Il s’agit d’un processus d’apprentissage social par lequel les pratiques et les comportements sont ajustés en vue d’une meilleure utilisation du milieu environnant et d’une contribution au bien-être aux niveaux individuel, communautaire et sociétal. En tant que tel, le savoir autochtone a guidé les sociétés et soutenu la gestion durable des ressources, en particulier dans les régions où les pratiques sont connues depuis des centaines d’années.
Rôles respectifs
En outre, l’intégration des méthodes et des pratiques scientifiques, et des connaissances autochtones n’est-elle qu’un moyen de rendre les premières plus acceptables par les populations ? Là aussi, des discussions seront utiles.
En revanche, la science occidentale produit souvent des connaissances à partir de la simulation du monde réel par la modélisation. Par conséquent, non seulement les connaissances autochtones sont un indicateur important de la manière dont le développement durable peut être réalisé, mais elles peuvent également compléter la science et la politique en les plaçant dans le contexte local pour une meilleure mise en œuvre.
L’éthique sera fondamentale
Les connaissances autochtones ne peuvent pas non plus être simplement des sources de nouvelles idées à tester ou à valider par la science. Les auteurs du rapport parlent de coproduction : il faut aussi préciser de quoi il s’agit, car les bonnes intentions ne suffisent pas.
Il est donc nécessaire de s’engager avec les populations autochtones, qui possèdent des savoir-faire et des cultures diverses, en vue de nouvelles collaborations tout au long de la chaîne de valeur de la production de connaissances, afin de coproduire une politique éclairée, d’améliorer les preuves et de mettre en œuvre l’Agenda 2030. Les connaissances autochtones existantes sur les mégatendances telles que la biodiversité, l’adaptation au changement climatique et la conservation des terres doivent être documentées.
Plus important encore, un respect et une éthique solides sont essentiels tout au long du processus. Il faut exploiter et garantir les connaissances autochtones en ce qui concerne la propriété intellectuelle, qui appartient aux peuples autochtones. La stratégie pour la science, la technologie et l’innovation en Afrique 2024 vise à garantir et à utiliser les connaissances autochtones dans le cadre de ses priorités scientifiques.