Dans le cadre du projet Biosphère et patrimoine du Lac Tchad (BIOPALT), une équipe IRD de l’UMR GET a participé au développement et au déploiement en open data du portail mondial de l’UNESCO sur la qualité de l’eau.
Ce portail, inauguré au siège de l’Unesco le 17 novembre dernier, permet désormais la mise à disposition de données sur la qualité de l’eau du lac Tchad en se basant sur l’observation de la Terre par satellite. Ce lac est une exceptionnelle retenue d’eau douce qui permet non seulement de faire vivre plus de 45 millions de personnes en Afrique mais représente également une importante niche de biodiversité.
Le lac Tchad est le premier bassin au monde à bénéficier de cette technologie
Si la variabilité de sa taille et surtout la diminution de plus de 90% de sa surface sont bien documentées, le suivi de la qualité de ses eaux n’a fait l’objet que de rares études depuis les recherches pionnières de l’ORSTOM? dans les années 60 et 70. En effet, la complexité de cet écosystème, formé de centaines de lagunes, et les récents problèmes sécuritaires écartent toute possibilité d’utiliser des moyens conventionnels de mesure avec des équipements permanents ou des prélèvements d’eaux réguliers.
L’absence d’information représentait un obstacle majeur pour l’établissement d’un diagnostic sur la dégradation de cet écosystème unique. Les nouvelles données produites seront donc essentielles pour l’élaboration de politiques et de priorités de gestion pour la protection de la qualité de l’eau et des écosystèmes ainsi que pour la mise en œuvre des Objectifs de Développement Durable dans la région.
Une surveillance par satellites de multiples paramètres : comment ça marche ?
La production des données est basée sur des algorithmes open source développés par des instituts de recherches français menés par l’équipe de recherche IRD basée à l’UMR GET. Ces algorithmes utilisent des images provenant de satellites d’observation de la terre dont les satellites Sentinel-2 lancés en 2015 et 2017 par l’Agence Spatiale Européenne. Les principaux paramètres mis à disposition pour le lac principal, les nombreuses lagunes ainsi que les rivières drainant la région sont :
- les concentrations en matières en suspension,
- la turbidité,
- un indicateur de la présence de matières organiques dissoutes,
- la concentration en chlorophylle-a,
- un indicateur de toxicité des algues (HAB),
- la variabilité des surfaces inondées,
- le niveau du lac,
- la température de surface des eaux.
Images par satellites :
Focus sur la contribution IRD
Les chercheurs de l’IRD sont intervenus sur toutes les étapes du traitement des données spatiales en passant par la validation des données jusqu’à la formation des utilisateurs du portail.
“Ce portail constitue une réelle avancée scientifique et pour le développement car il met pour la première fois, en accès libre, des informations sur la qualité des eaux des lacs et rivières du bassin du Lac Tchad et avec une précision sans précédents. Les données seront ainsi utiles aussi bien pour des chercheurs, des institutions gouvernementales que pour les acteurs de la société civile” explique Jean-Michel Martinez, Directeur de Recherche de l’IRD.
Aujourd’hui, l’IRD contribue au développement de techniques innovantes pour l’exploitation des données spatiales afin de fournir des informations sur la qualité des eaux des rivières, lacs et estuaires au Sud. Ces travaux considèrent des développements théoriques sur la modélisation des propriétés optiques des eaux, la création de logiciels de traitement des données, leur diffusion aux partenaires du Sud ainsi que le transfert de technologies aux travers de programmes de coopération comme celui du Portail Mondial de l’Unesco et celui avec l’Agence de l’Eau du Brésil sur le programme Hidrosat.
Coopération transfrontalière et pluridisciplinaire
La réalisation de ce projet est un excellent exemple de coopération entre des instituts de recherche, une entreprise privée, ainsi que des organisations gouvernementales internationales et régionales.
Liste des contributeurs :
- L’IRD ; le Centre Nationale d’Etudes Spatiales (CNES) ; l’Office Français de la Biodiversité (OFB) ; l’Institut National de Recherche sur l’Agriculture, l’Alimentation et l’Environnement (INRAE) ; l’Institut français de la recherche scientifique (CNRS).
- Magellium, société française spécialiste du traitement et de l’analyse d’image numérique.
- Les experts de la Commission du bassin du lac Tchad (CBLT) ont contribué à la collecte et à l’analyse des mesures in situ de la qualité de l’eau du bassin du lac Tchad. Ces mesures ont été utilisées afin de calibrer et de valider les données produites par les algorithmes.
- La division ‘water science’ de l’Unesco qui a assuré la coordination des efforts de tous les partenaires.
Prochaine étape : le portail Unesco au service du bassin du Rio de la Plata
L’utilisation du portail Unesco pour la surveillance de l’eau sur le Lac Tchad constitue une première étape dans le déploiement de cet outil innovant. Une nouvelle phase est déjà en développement sur le bassin du Rio de la Plata avec l’UNESCO et le Comité Intergouvernemental Coordinateur des Pays du Bassin de la Plata (CIC Plata) formés par des institutions des cinq pays qui partagent ce bassin : Brésil, Bolivie, Paraguay, Uruguay et Argentine.
Plus d’informations, c’est par ici
- Pour accéder au portail
https://lakechad.waterqualitymonitor.unesco.org/portal/
En savoir plus
- Sur le portail https://en.unesco.org/waterqualitymonitor/lake-chad
- Sur le projet Biopalt https://fr.unesco.org/biopalt
- Sur l’UMR GET https://www.get.omp.eu/