Les arbres fournissent toute une série de services écosystémiques aux agriculteurs qui les entretiennent et aux cultures avec lesquelles ils partagent les parcelles agricoles. Mais ces services entrent parfois en concurrence, ce qui nuit à la production agricole.
Les parcs agroforestiers sont emblématiques de l’Afrique subsaharienne et font partie intégrante des paysages agricoles africains. Les arbres fournissent une série de services écosystémiques aux agriculteurs qui les entretiennent et aux cultures avec lesquelles ils partagent les parcelles agricoles. Cependant, ces services entrent parfois en concurrence, ce qui a des effets négatifs sur la production agricole. Ces effets peuvent être atténués en adaptant les pratiques agricoles.
Parcs agroforestiers
Les parcs agroforestiers sont des espaces agricoles comportant quelques arbres, choisis par les agriculteurs dans le cadre de rotations successives de cultures et de jachères. Ils fournissent des produits alimentaires (pour les personnes et le bétail), du combustible et des matériaux artisanaux. La couverture qu’ils fournissent rend les exploitations agricoles plus résistantes aux aléas climatiques et sanitaires (ombre, humidité, santé des sols). Ces avantages, appelés « services écosystémiques », sont généralement étudiés séparément et à l’échelle de l’arbre.
Une nouvelle étude, publiée dans la revue Science of The Total Environment, propose pour la première fois une analyse des relations entre ces services à l’échelle du paysage.
« Sur les 11 services écosystémiques étudiés dans les parcs agroforestiers du Sénégal, nous avons observé une compétition entre ces services sur plus de 50% de la surface concernée, explique Louise Leroux, géographe au CIRAD et auteur principal de l’étude. C’est un résultat majeur car il permet de qualifier les avantages connus à l’échelle de l’arbre. En fonction des relations entre ces services, nous pourrons mettre en évidence des leviers adaptés pour adapter les pratiques agricoles. »
De nombreux services rendus
Aujourd’hui encore, la plupart des études analysent les services écosystémiques rendus par les arbres aux cultures sans tenir compte des relations entre ces services, ni de l’hétérogénéité des parcs en termes de densité d’arbres ou de diversité des espèces.
Les analyses des services individuels sont essentielles pour comprendre l’impact des arbres sur les opérations agricoles. Par exemple, Faidherbia albida, une espèce d’arbre largement cultivée dans les parcs agroforestiers du Sénégal en raison du fourrage nutritif qu’elle fournit, favorise la fixation de l’azote atmosphérique dans les sols.
Cela permet de restaurer la fertilité des sols et de réduire l’utilisation d’intrants synthétiques par les agriculteurs. Toutefois, ces analyses sont insuffisantes pour comprendre les relations entre les différents services et leur variabilité au sein de l’écosystème dans son ensemble, comme le souligne Louise Leroux.
« Lorsque nous avons examiné les relations à l’échelle du paysage, nous avons constaté que les services étaient en concurrence les uns avec les autres dans certaines parties du parc étudié, alors qu’ils travaillaient en synergie dans d’autres zones. Les avantages s’annulaient mutuellement, ce qui signifie que nous devons repenser la façon dont nous gérons les cultures, et le parc agroforestier dans son ensemble, pour limiter la concurrence entre les services. Pour renforcer l’efficacité « agronomique » de ces parcs, il faut identifier les zones où il y a synergie et les analyser pour comprendre pourquoi.»
Jouer sur les pratiques agricoles pour booster la synergie
Les chercheurs ont notamment observé que les synergies entre services écosystémiques étaient plus nombreuses dans un rayon de dix mètres autour des arbres. Ils suggèrent donc aux agriculteurs de concentrer les apports de matière organique en dehors de cette zone, afin d’optimiser la gestion des sols.
« Ces parcs sont très anciens, précise Josiane Seghieri, écologue à l’IRD et coordinatrice du projet RAMSES II. L’objectif de cette étude n’était pas seulement de dire qu’il faut ajouter des arbres, mais qu’il existe des marges de manœuvre pour améliorer la gestion des parcelles agricoles dans ces zones.»
L’IRD a publié ce rapport pour la première fois.