Un accord pour mettre fin à la crise énergétique en Afrique du Sud est en vue.
Selon des experts, l’accord signé pour mettre fin à la crise énergétique persistante en Afrique du Sud, contribuerait à une augmentation des émissions de gaz à effet de serre et ne fournirait qu’une solution de court terme.
Dans le monde, près de 750 millions de personnes n’auront pas accès à l’électricité en 2050, dont plus de 95% en Afrique subsaharienne, selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE) dans son rapport Net Zero by 2050 report.
L’Afrique du Sud est confrontée à certaines des pires pannes d’électricité jamais enregistrées. Une recherche (pdf) du Conseil pour la recherche scientifique et industrielle (CSIR) basé à Pretoria, montre que ces pannes récurrentes ont représenté 530 heures sans électricité en 2019 et ont coûté à l’économie entre 60 et 120 milliards de rands.
“Au lieu de louer des navires électriques gérés par des étrangers, qui finiront par nous quitter dans 20 ans, nous pourrions investir dans des infrastructures qui fourniraient des emplois.” Thandile Chinyavanhu, Greenpeace Afrique
Le 19 mars, Karpowership, société qui possède des centrales électriques montées sur des navires, a été reconnue comme un soumissionnaire privilégié par le ministère sud-africain des Ressources Minérales et de l’Énergie pour fournir 1 220 mégawatts d’énergie dans le cadre du programme d’approvisionnement par des producteurs d’énergie indépendants pour l’atténuation des risques (RMI4P).
Dans le cadre de cet accord, Karpowership fournirait à l’Afrique du Sud cinq navires de production électrique fonctionnant au gaz naturel liquéfié de 2022 à 2042, pour un coût de 18 milliards de rands (environ 13,3 milliards de dollars).
Infrastructures à long terme, investissements nécessaires
« L’idée derrière le RMI4P est d’obtenir de l’énergie… pour arrêter le délestage [les pannes] et nous donner suffisamment de temps pour lancer les achats d’infrastructures à long terme et les investissements nécessaires pour avoir un approvisionnement énergétique durable, explique Lauren Hermanus, doctorante à l’université du Cap en Afrique du Sud, et fondatrice d’Adapt, réseau de développement durable. Le gaz est quelque chose qui peut être utilisé pour équilibrer un système fondé sur les énergies renouvelables, par exemple, lorsqu’il y a une variabilité dans le système en raison de la dépendance au Soleil ou au vent. »
Cependant, Thandile Chinyavanhu, chargée de campagne sur le climat et l’énergie à Greenpeace Afrique, trouve que le contrat de 20 ans proposé par l’accord est problématique.
Trajectoire d’émissions plus élevées
« Cela nous enfermerait dans une trajectoire d’émissions plus élevées jusqu’au-delà de 2040 sans un plan clair pour l’approvisionnement en énergies renouvelables, poursuit L. McDaid. Au lieu de louer des navires électriques gérés par des étrangers, qui finiront par nous quitter dans 20 ans, nous pourrions investir dans des infrastructures qui fourniraient des emplois aux jeunes Sud-Africains.”
Impact environnemental
Plus de 41% des Sud-Africains âgés de 25 à 35 ans sont actuellement sans emploi, selon l’agence de statistiques sud-africaine Stats SA. Le chômage total dans le pays atteint le chiffre record de 7,2 millions.
L’impact environnemental potentiel de l’accord avec Karpowership est également préoccupant, selon Liziwe McDaid, conseillère en énergie pour l’organisation à but non lucratif The Green Connection. Les enquêtes qu’ils ont menées ont révélé que les évaluations environnementales de Karpowership manquaient de données clés sur son impact sur les communautés locales de pêcheurs et de marins.
Le manque d’informations environnementales
« Du point de vue de la gouvernance environnementale, [le] gouvernement n’avait pas sur la table toutes les informations dont il avait besoin pour décider d’approuver Karpowership », dit-elle.
Karpowership n’a pas répondu aux courriels de SciDev.Net à propos de ces préoccupations.
Un virage vers les technologies propres
Un passage mondial aux technologies propres a été demandé par l’AIE, qui exhorte les gouvernements à mettre « la R&D, la démonstration et le déploiement au cœur de la politique énergétique et climatique. »
Pour L. Hermanus, cependant, ce changement ne peut se faire sans une localisation de la fabrication dans le cadre d’une stratégie d’industrialisation verte. « Elle doit poursuivre une voie riche en emplois et avec un développement économique équitable », conclue-t-elle.
Laura Owings
Cet article a d’abord été publié par SciDev.Net.