Panorama et perspectives de l’ouverture des données de la recherche en Afrique. Le deuxième colloque de Science ouverte au Sud qui s’est tenu à Cotonou en octobre 2022 a été un franc succès et a débouché sur de nombreuses recommandations.
Le colloque international Science ouverte au Sud est le lieu où scientifiques, professionnels de l’information et représentants d’institutions de recherche, d’organisations en charge de politiques de recherche échangent sur les enjeux de la science ouverte et partagent leurs expériences.
En 2019, la première édition s’était tenue à Dakar. La « Déclaration pour le partage et l’ouverture des données de la recherche pour le développement durable » qui y a été rédigée fixe un ensemble d’objectifs concernant la gestion, la valorisation, le partage et la gouvernance des données.
L’édition 2022, qui a eu lieu à Cotonou du 25 au 27 octobre 2022, ambitionnait de dresser un panorama des approches en matière de gestion et d’ouverture des données de la recherche en Afrique, particulièrement en Afrique francophone, de partager et de promouvoir les bonnes pratiques.
En voici les recommandations principales.
Une ouverture et un partage des données urgents
Pauvreté, problèmes sanitaires, difficultés d’accès à l’éducation, accroissement des inégalités… Les communautés scientifiques africaines contribuent fortement à répondre aux grands défis sociétaux de développement actuels qui impactent fortement les sociétés du Sud. Elles produisent un grand nombre de données et de connaissances dont le potentiel scientifique, politique, économique et social reste trop largement sous-utilisé, car faiblement diffusé ou accessible.
A l’heure où les pratiques de partage et d’ouverture des productions scientifiques se généralisent au sein des communautés scientifiques, il est essentiel que les scientifiques africains puissent inscrire leurs pratiques de recherche dans cette dynamique afin de renforcer la visibilité de leurs travaux à l’échelle internationale.
Afin de favoriser l’adhésion des scientifiques africains à ces nouvelles pratiques, il est déterminant d’établir un climat de confiance, un partage équitable ainsi qu’un accès inclusif et ouvert aux dispositifs de gestion des données.
Au titre des différents constats et attentes de la communauté de la recherche africaine relevés lors du colloque Science ouverte au Sud de Cotonou, nous recommandons d’agir sur plusieurs leviers et à plusieurs niveaux. Pour cela, la Recommandation de l’Unesco sur une science ouverte offre un cadre commun et une réelle opportunité pour une mise en œuvre coordonnée de la science ouverte sur le continent africain.
Développement d’infrastructures et sensibilisation
Les gouvernements doivent se saisir de la recommandation de l’Unesco pour élaborer leur politique nationale. Sur la base d’une feuille de route détaillée, cette politique doit inclure le développement des infrastructures numériques nécessaires à la gestion et à la diffusion des données. Le développement d’une culture de la science ouverte au sein des communautés de recherche constitue la garantie d’une intégration durable des pratiques au sein des activités de recherche. Sur ce dernier point, la prise en compte des pratiques de science ouverte dans les critères de promotion des chercheurs et chercheuses est un levier pour faire évoluer notablement et durablement leurs pratiques.
Des actions de sensibilisation et de formation auprès de la communauté scientifique doivent accompagner la mise en œuvre des politiques nationales. Il conviendra de proposer de nouvelles filières de formations initiales, mais aussi continues, sur les différents aspects de la science ouverte et de la science des données. La maîtrise du partage et de l’ouverture des données de la recherche et leur valorisation au sein du continent africain repose sur la montée en compétences dans les métiers du numérique des futurs ingénieurs, ingénieures, chercheurs et chercheuses africaines.
Plus d’inclusion et de coopération
La science ouverte se doit d’être inclusive, et ce dans toutes ses dimensions. Nous avons relevé, sous diverses formes et à diverses reprises, l’importance que revêt pour les participants la prise en compte de la diversité des approches et pratiques en science ouverte. Il est important de favoriser l’inclusion de tous et toutes, quels que soient son genre, sa langue ou sa formation, et favoriser ainsi le plus large accès aux dispositifs de diffusion des productions de la recherche, tels que les archives ouvertes et les entrepôts de données notamment.
La science ouverte en Afrique passera par la coopération des nations africaines entre elles et par l’ouverture aux échanges scientifiques à l’échelle mondiale. L’ouverture et l’inclusion ne pourront se réaliser à l’échelle de l’Afrique qu’à travers la coopération internationale entre tous les pays africains, par une mutualisation des moyens, une convergence de nos normes et pratiques de recherches, et enfin par la mise en réseau des
différentes communautés de scientifiques à travers une coopération Sud-Sud et Nord-Sud.
La prise en compte et l’implémentation de ces différents points permettra de favoriser l’accès de tous et toutes aux productions académiques, pour l’ensemble des acteurs politiques, socio-économiques, associatifs ou simples citoyens et citoyennes, dans le respect, la justice et le souci d’équité. Cela repose également sur l’instauration d’un meilleur dialogue entre scientifiques et décideurs pour que la science devienne un réel moteur du développement.
Ces conclusions sont le fruits d’un travail de plusieurs auteurs :
L.. Bezuidenhout (DANS, Pays-Bas), H. Catherine (IRD, France), C. Coulibaly (UVCI, Côte d’Ivoire), J-C. Desconnets (IRD, France), J. Cossi Ganglo (Université Abomey Calavi, Bénin), N. Ardo Kane (ISRA, Sénégal) , N. Mchunu (NRF, Afrique du Sud), M. Popoola (FCAHPT Ibadan, Nigéria), F. Sabot (IRD, France), J. Tshibwabwa (Université de Kinshasa, Congo-Kinshasa)
Lien vers l’évènement: https://www.iybssd2022.org/fr/events/science-ouverte-au-sud-gestion-et-ouverture-des-donnees-de-la-recherche-panorama-et-perspectives-en-afrique/
Informations complémentaires : opensciencesud2@sciencesconf.org